Au moment où commence la Révolution Française, quels sont ceux qui à Écoche sont chargés de faire exister les nouvelles institutions ?

 

 

 

Si l’on en croit l’abbé Prajoux, qui écrivait plus de 100 ans après l’événement et que reprend  l’auteur de Histoire d’une Paroisse, Écoche, le conseil général d’Écoche (officiers municipaux et notables) élu en 1790 se composait de Morel maire et de Auclair, Batailly, Buchet, Chavoin, Glatard, Guyot, Labrosse, Magnin et Verchère. Ces hommes furent élus par les citoyens actifs, c’est-à-dire les hommes de plus de 25 ans payant une contribution au moins égale à la valeur de trois journées de travail ; la journée de travail étant fixée localement par l’ancienne communauté des habitants réunies à cet effet : partout en France on fixa une valeur basse, ce qui permit à  la plupart des citoyens d’être considérés actifs, cependant pour être éligibles il fallait payer l’équivalent de 10 journées de travail en impôt. On peut donc en conclure que les élus ne sont pas forcément très riches –surtout dans une commune pauvre comme Écoche- mais plutôt connus, notables et si possible sachant lire et écrire.

 

 

 

En utilisant les diverses recherches généalogiques que l’on trouve sur le site Geneanet et en allant aux sources des Archives Départementales pour les registres paroissiaux et l’état-civil, on peut préciser davantage ; un constat s’impose : la plupart de ces dix notables sont reliés entre eux dans une sorte de réseau familial fonctionnant par des alliances matrimoniales et par des fratries parfois très nombreuses. L’exception de taille est celle de Glatard qui doit sa place à son appartenance à une bourgeoisie naissante, il est négociant et cardeur de coton (à Rottecorde). Mais Laurent Glatard est né en 1754 à Saint Vincent de Reins et toute la famille (fils et petit-fils..) a toujours préféré  prendre des épouses en dehors de la commune, cherchant plutôt à s’allier à d’autres familles bourgeoises : les Vadon de Charlieu, les Richou venus d’Anjou, les Sonnery de Tarare, les Poyet de Chateauneuf... Néanmoins Laurent Glatard avait épousé Benoite Vadon une jeune veuve d’une famille de notables d’Arcinges et Écoche . Laurent Glatard devient en 1792 le deuxième maire d’Écoche

 

 Auclair qu’à l’époque on orthographiait indifféremment Auclerc ou Aucler ou Auclair est Étienne Auclerc, jeune homme né en 1765, petit-fils de Clément Guyot maréchal et arrière-petit fils de Claude Poncet , consul des habitants au début du XVVIIIe   . Il a le même grand père que Joseph Guyot (voir ci-dessous). Plus tard, marié à une auclerc de Coublanc, il deviendra aussi maire de Coublanc.

 

Magnin est Mathieu Magnin, né en janvier 1751 et fils de Marie Bussy, Il descend en outre de  Jeanne de Montcorgier qui avait épousé à la fin du XVIIème siècle le premier Bussy arrivé à Écoche. Or cette Jeanne de Montcorgier est la fille et petite fille de notaires royaux de Cuinzier, Jarnosse, Chandon. La particule ne signifie en rien noblesse puisque certains seront appelés tout simplement Montcorger ; inversement les ancêtres des Bussy se nomment parfois de Bussy. Il n’y a pas en ces temps une trop impérieuse rigueur orthographique. Mais ce qui nous intéresse ici c’est que pour être notaire royal au 17ème siècle, il fallait savoir écrire. On peut imaginer que ce savoir se transmit aux descendants ; et voilà qu’on peut aisément conclure que Mathieu Magnin savait écrire. Et cela est confirmé par le fait qu’à compter de septembre 1796 Mathieu Magnin tint les registres d’état-civil, d’une assez jolie écriture et avec une belle signature. On peut ajouter -mais c’est important- que Mathieu Magnin est le grand père de la fratrie Puillet qui donnera Mathieu vicaire puis curé d’Écoche de 1724 à 1774 : cinquante ans dans le presbytère ! Victor instituteur à Écoche, Benoît entrepreneur bienfaiteur de l’église d’Écoche, Pierrette que nous allons retrouver plus bas.. D’autre part ces Puillet ont aussi pour arrière grand-mère une Pierrette Bussy fille d’une Claudine Brossette.

 

Guyot est sans doute Joseph Guyot né en 1756 et qui a épousé en 1785 une jeune fille d’environ 16 ans Benoîte Buchet ou Bruchet, sœur de Benoît Buchet, lui aussi officier municipal et futur maire de 1799 à 1811. Joseph Guyot -son beau-frère donc- était, au bourg, maréchal-ferrant, ce qui pouvait donner une certaine aisance et lui permettre de connaître beaucoup de gens. Malheureusement il meurt en 1798. Mais la famille Guyot aura une descendance très impliquée dans les affaires municipales. Claude, le fils de Joseph épouse en 1818 Marie Jeanne Morel, la fille du maire Jean Morel. Un petit-fils de Joseph épousera en 1852 la sœur du curé et de l’instituteur communal : Pierrette Puillet. Au milieu du XIXème un Guyot fut l’adjoint de Glatard. Au 20ème siècle, Lucie Guyot fut l’épouse d’Émile Plassard qui fut maire de 1939 à 1965 soit un des plus longs mandats écochois. Un autre maire Joseph Larue était aussi apparenté aux Guyot. Mais aussi notre Joseph est lui-même un des descendants des notaires Montcorgier du 17ème siècle, comme Auclerc, comme Magnin,

 

Benoît Buchet ou Bruchet outre d’être le beau-frère de Joseph Guyot se maria en 1796 avec Louise Marie Lebretton  petite fille d’un marchand de Charlieu Jean Carré, apparenté au prêtre François Carré, encore curé d’Écoche en 1790 et même 1793 où il fut aussi officier public. Les Lebretton ou Lebreton donnèrent aussi quelques notables à Écoche dont Claude Marie maire élu en 1848 jusqu’en 1850  puis notaire à Chauffailles. Plus tard Marie Victorine Lebreton a été la mère d’Émile Plassard maire de 1939 à 1965.

 

Batailly sans doute Claude Batailly né en 1733 descend d’une famille aisée de marchands de Cublize dont l’un fut greffier de justice au 17ème siècle : on retrouve le savoir-écrire d’un ancêtre. La famille s’est installée vers 1730 à Écoche. En 1763 il épouse une jeune fille d’Arcinges dont les ancêtres furent marchands à Écoche (Debiesse) ou notaires royaux à Arcinges (d’Estre). Ses enfants marquent leur implantation écochoise : son fils Claude-François épouse en 1795 une jeune fille de 15-16 ans, Françoise Laroche fille de tailleurs d’habits, dont le frère Claude né en 1770 est certainement celui qui tint les registres de l’état-civil en 1794-1796. Parmi les ancêtres de Françoise, des marchands de Mardore et un « maistre maréchal » d’Écoche. On trouve aussi des ascendants alliés aux Guyot eux aussi il est vrai dans la maréchalerie ! Pierrette Batailly fille de Claude épousa Benoît Magnin autre fils de Marie Bussy. Une autre fille, Anne  épousa Antoine Larue, lequel par sa mère descendait directement d’Henri d’EStre notaire royal et juge à Arcinges et Écoche.

 

Labrosse est sûrement Claude-Marie Labrosse né à Ranchal mais qui en novembre 1786 avait épousé une veuve d’Écoche qui n’était autre que la belle-mère de Benoît Marie Brossette futur maire (1812-1821 et 1825-1930 puis 1839-1840) Claude-Marie était très proche de Brossette puisqu’il fut le parrain de son fils Claude-Marie, lui aussi maire d’Écoche, entre 1840 et 1848 ; le parrain aussi de sa fille Joséphine née en 1808.

 

Verchère est Guillaume Verchère (qu'on retrouve en 1793), cultivateur et maçon. Bien que né à Cours il avait épousé la fille de la sage femme d’Écoche qui avait dû mettre au monde les ¾ de la paroisse ; sa fille épousera un Poizat petit-neveu de François Carré le dernier curé d’Ancien Régime choisi en 1793 par le conseil pour être officier public de l’état-civil

 

Chavoin est Louis-François Chavoin né en 1740, chirurgien descendant d’une famille de maîtres chirurgiens de Saint Hilaire sous Charlieu mais marié avec Anne Batailly grande tante de Claude François Batailly. Comme son cousin par son ascendance mais aussi  par son métier Louis-François est un « lettré ». Il est directement lié aux notables écochois d'Ancien Régime puisque sa mère est la fille de Marie Deschézeaux soeur du notaire royal d'Écoche. Sa soeur Marie eut pour descendant un maire d'Écoche au XXème siècle Claudius Auvolat

 

Quant à Jean Morel, né en  1758, on a vu sa fille se marier avec un membre de la famille Guyot. Son fils épousera la fille du maire de Pradines et aura comme petit-fils François Morel  maire, élu de 1887 à 1892, lui aussi gros propriétaire terrien, à Laval. François Morel est également l'arrière-petit fils de Benoit François Matray qui fut maire de 1850 à 1852.

 

Ainsi donc cette première municipalité comprenait des hommes très proches les uns des autres, sachant écrire et descendant de familles déjà notables sous l’Ancien Régime. On peut compléter ceci en précisant qu’en 1650 – soit au début du règne de Louis XIV- fut baptisée en l’église d’Écoche Jeanne de Sirvinges, fille de François de Sirvinges, écuyer et de Jeanne Bussy. Or Jeanne de Sirvinges épousa en 1672 Pierre Brossette frère de Grégoire, ancêtre des maires.

 

On connaît aussi quelques noms d’officiers publics en charge de l’état-civil pour cette période. Après François Carré, curé qui se chargea surtout de transcrire en 1793 les derniers registres paroissiaux, on trouve le nom de Benoît Sadot. Né en 1724, il meurt en septembre 1799 ; sa grand-mère était Claudine de Montcorgier ; son frère était locataire au château du But à sa mort en 1777. Descendant de notaires royaux, il sait écrire et tenir les registres.

 

Après Benoît Sadot Claude Laroche ; il est le fils d’un tailleur d’habits et descend par sa mère d’une famille de marchands de Cours. Il meurt apparemment veuf et sans enfants en 1796, son décès n’étant enregistré qu’en 1799.

 

On trouve aussi un adjoint (car au moment des municipalités cantonales le maire est celui de Belmont) François Larue ; plusieurs Écochois portent à ce moment le nom de François Larue ; mais il s’agit de celui né en 1765, qui se marie en 1796. Dans sa descendance, des prêtres, une religieuse et le gendre de Nicolas Troncy l’ébéniste des boiseries de l’église. Il descend aussi des notaires Destre d’Arcinges par sa mère. A noter que son arrière grand-père originaire de Tancon et meunier s’est marié deux fois à Écoche et qu’ainsi il y eut deux branches de Larue ; dans la deuxième installée à Lardillat on trouve le maire élu en 2014, Jean-charles Butaud ; une autre sous-branche compta dans ses rangs un maire Joseph Larue et la seule personnalité écochoise présente dans l’odonnomie écochoise et lyonnaise, l’abbé François larue

 

 

 

Il est donc intéressant de comparer ces noms avec ceux des représentants de la communauté d’Ancien Régime. On voit néanmoins que ces réseaux familiaux ne se limitent pas à l’ancienne paroisse car on a de nombreuses alliances avec Arcinges, Sevelinges, Cours, Ranchal, Cuinzier, Jarnosse, paroisses plus au sud, moins fréquemment avec des paroisses du nord (Mussy sous Dun) ou de l’ouest (Charlieu).

 

De toute façon la continuité entre les époques est flagrante

 

 

 

L'époque est troublée. C'est pourquoi au cours de la période révolutionnaire on trouve d'autres compositions de ce qui est en train de devenir une "municipalité", notamment à l'occasion de la vente des biens nationaux : anciens biens curiaux ou propriétés d'Abel de Vichy.

 

Ainsi, en novembre 1792, les « officiers municipaux de la paroisse d’Ecoche » sont Buchet, Guyot, Labrosse, Auclair, Destre, Sylvestre. Puis en février 1793 ce sont   Glatard, maire, Batailly, Bertillot, Auclair, Labrosse, Saquin, Sylvestre greffier.

 

Ce sont à peu près les mêmes qu'en 1790, à ceci près :

 

-N'apparaissent plus Magnin, Verchère, Morel, Chavoin. Pourquoi,? Peut-être absents au moment de l'élaboration du document? Peut-être parce qu'ils prennent leurs distances vis-à-vis des événements : la monarchie n'existe plus et nous sommes en l'an I de la République (mais on les retrouve parfois en 1793!)

 

-Laurent Glatard est devenu le maire

 

-Un "Saquin" apparaît. Qui est-ce? Peut-être une erreur de transcription pour Chavoin?? Ou Raquin ??

 

-On trouve un Destre,  peut-être appartenant à une famille de notables d'Ancien Régime très importante autour d'Arcinges, Mars, Écoche et Charlieu. Mais plus sûrement Pierre Destre maréchal-ferrant.

 

-Et un Bertillot, patronyme très présent à cette époque à Écoche ; il sait signer ; peut-être -comme Sylvestre?-  un vrai républicain.

 

-Sylvestre enfin qui devient greffier. C'est Claude-Marie un des deux fils de Benoît Sylvestre et Pierrette Carthelier. Cette dernière était la tante de Benoit Buchet. Benoit Sylvestre quant à lui descend  d'une famille de marchands de cours, les Silvestre et de notaires de Cours les Thivend. Parmi leurs ancêtres on trouve aussi des Debiesse ou un Jean Chastelus prévôt de Saint Maurice...Ilest surtout l’oncle d’ Estienne Auclerc. Bref pour être républicain, on n'en est pas moins de "bonne " famille.

 

Quelques jours après (février 1793 on a au moment de l'adjudication des bien des vichy cette note : « le maire Laurent Glattard, Claude Batailly, Guillaume Verchère, Jean Morel, Louis Berthillot, et Etienne Auclair, en présence de Mathieu Magnin procureur de la commune, assisté de Claude Sylvestre notre secrétaire greffier, se déplacent au But pour constater toutes dégradations dans les bâtiments ».

 

On y retrouve quelques noms de 1790 : toujours Laurent Glat(t)ard, Jean Morel, Claude Batailly et Mathieu Magnin désormais procureur (c'est-à-dire le personnage qui représente  la République) ; ainsi que Claude (Marie) Sylvestre. Louis Bertillot serait quant à lui un tisserand.

 

(*) Laurent Glatard est sans doute "arrivé" à Écoche par son mariage -en 1778- avec Benoîte Vadon. Cette dame était fille d'un Vadon de Saint Igny de Roche et veuve d'un Debiesse d'Écoche. Vadon, Debiesse : deux familles bien implantées localement et foncièrement, Qui plus est, Benoîte descendait des familles au service de la seigneurie d'Arcinges ou  de notaires royaux (les Destre). Les Glatard de Cublize étaient eux aussi assez riches et comptaient dans leurs ancêtres plusieurs officiers des juridictions de Cublize et Thizy. ON ne s'étonnera donc guère qu'un demi-siècle après leur arrivée à Écoche (cadastre de 1833) leurs biens fonciers soient très importants. Sur l'acte de mariage du registre paroissial d'Écoche  ci-dessous, on trouve, entre autres la signature de Batailly.