Un mémoire du procureur du Roy au baillage, envoyé à Gabrielle d’Amanzé en 1681, récapitule l’ensemble de la procédure que celle-ci a engagé par le truchement de son procureur Tupinier, principalement contre son frère Jacques seigneur d’Arcinges. Suite au décès de deux de ses frères Jean et Claude, elle cherche à connaître la valeur des biens de la succession de ses parents, Antoine d’Amanzé baron de Chauffailles et Françoise de Damas, dame d’Estieugues, l’héritage étant supposé très important (le trésor des d’Amanzé). Pour elle, mariée à Marc de St George, Tupinier convoque une multitude d’habitants pour les interroger sur ce qu’ils doivent aux d’Amanzé et éventuellement sur ce qu’ils savent de leur fortune. Ainsi par exemple un habitant de Mussy (Antoine Delaroche) déclare avoir voulu vingt-six ans auparavant, changer une pièce d’or valant huit pistoles et que, pour ce faire, Françoise de Damas l’emmena dans son cabinet du château de Chauffailles où « il vit deux bennes, l’une remplie de pièces de quinze sols, l’autre de pièces de trente et une table toute remplie d’écus blancs dont le déposant ne sait la quantité ».

 

Pour obliger les habitants à venir déposer, la dame de Saint George a obtenu du baillage un monitoire qu’elle ordonne aux curés de lire et fulminer au cours de la messe dans chaque paroisse : Tancon (curé Hierosme Duperron) , Coublanc (Benoît Bourgeois), Belmont (Jean Trambouze), Saint Igny de Roche (Louis Thivint), Escoches (Blaize Mathieu), Cours (Marc Dessaux), Mars (Benoît Marque), Arcinges (par le curé de Mars, sans doute parce que celui de la paroisse est trop lié au seigneur d’Arcinges Jacques d’Amanzé) et Saint Germain la Montagne (benoît F.) ; pour Mussy et Chauffailles la procédure est différente et passe par des habitants directement semble-t-il. Mais les curés ne sont pas forcément réjouis de cette demande car ils doivent donner les « noms et surnoms » des paroissiens récalcitrants. Celui de Mars ne le fait pas parce que, dit-il, les habitants d’Arcinges lui sont étrangers. Qu’à cela ne tienne ; qu’il recommence le prochain dimanche et le seigneur de St George lui assurera le concours de plusieurs de ses gens qui l’aideront à menacer les récalcitrants.

 

Plus étonnante est la situation du curé d’Écoche.  Il déclare avoir été « empêché de lire par une personne à lui inconnue qui s’était travestie en femme, laquelle vint à lui et déchira ledit monitoire entre les mains dont il ne lui resta qu’une partie qu’il nous a exhibé et qui a été par nous paraphé et remis entre les mains  de notre greffier de laquelle violence il prit à témoin » Mais Tupinier ne s’en laisse pas conter et explique que « l’intelligence dudit Messire Mathieu avec les complices de faits en question est toute évidente pour tout ce qui est dit ci-dessus qui n’est que pur artifice à dessein de divertir et faire [échouer] les présents requérants » et il « enjoint au sieur Messire Mathieu de fulminer au premier jour de dimanche le monitoire en question au prône de la messe ainsi qu’il est de l’ordre et non à l’issue de la messe aux peines de droits et d’être condamné en tous les dépens dommages intérêt ... en cas de refus ou de retardement ».

 

 

Le document est riche d’environ 350 noms de personnes vivant à cette date : les 235 déposants mais aussi ceux qu’ils citent (notaires, curés, membres de leur famille...). Ces personnes sont des marchands, des laboureurs, des notaires, etc. mais rarement  de simples tenanciers, même s’il y a plusieurs tixiers. Les précisions ne manquent pas, ainsi pour le 130e déposant : « Estienne Delacoste marchand d’Escoches demeurant à St Igny de Roche âgé de 52 ans  assigné par exploit.....après avoir déclaré n’être ni parent ni domestique des parties ; enquis sur le contenu de la plainte et monitoire dont lecture lui a été faite, dépose qu’il y a environ cinq ou six ans qu’il emprunta du seigneur de Chauffailles pour une somme de quarante écus dont il lui.....obligations dont il est encore coobligé avec Catherin Joannard d’une autre somme de 200 livres au profit dudit seigneur de Chauffailles père pour environ huit années lesquelles sommes sont encore ....souventes fois fréquenté la maison de Chauffailles dans laquelle il allait souvent changer des pièces d’or pour avoir de la monnaie qu’ils étaient en réputation d’avoir.....pièces d’argent qu’il les a pourtant point...qu’il a aussi oui dire qu’on a pris au seigneur d’Arcinges dans son cabinet quantité d’or et d’argent et de papiers....qui est tout ce qu’il a dit savoir. » Les interrogatoires (dits informations) sont menés en 1680 par Delamartine, Tupinier et Fourré dans divers lieux, par exemple le lundi 29 avril 1680 à Charlieu dans le logis à l’enseigne le Griffon dès 8 heures du matin.

L’affaire se terminera plus tard par l’intervention de Marianne Rolin qui après moults procès emportera la mise pour son fils. Voir batailles de dames.  

 

D‘autres habitants (32) d’Écoche sont présents dans ce document (archives Vichy réf 122.03) :

 

Benoît Potier laboureur, 66 ans (en avril1680)

 

Vincent Debiesse laboureur, 76 ans

 

Benoit Desseigne, tisserand, 45 ans ; son père alors décédé Claude Desseigne.

 

Benoit Matray, laboureur,62 ans

 

Antoine De Ripierre, laboureur, 55 ans.

 

Claude Jouannard, laboureur, 71 ans ; son beau-père Claude Cutrier ( ?) encore vivant en 1664

 

Benoît Joannard, laboureur, 50 ans ; le premier mari de sa femme Claude de Fontimpe, décédé

 

Claude Siguret, laboureur, 24 ans ; son père Claude Siguret, caution pour un nommé Cuchet.

 

Adrien Marchand, tixier, 20 ans ; son aïeul Antoine Desportes

 

Claude Siguret le jeune, laboureur,38 ans ; son beau-père Claude Rochu (ou Rocheu)

 

Étienne Delaval, laboureur, 40 ans

 

Jean Delaplace, granger, 28 ans ; son père Jean Desplace (mort vers 1668)

 

Philibert Delaplace, laboureur, 55 ans.

 

Claude Joannard, maréchal demeurant au village, 40 ans ; son père Claude Joannard

 

Catherin Auclerc, laboureur, 27 ans ; son père Claude Auclerc, décédé.

 

Antoine Cuchère, laboureur, 60 ans ; Jean Aubonnet.

 

Claude de la Chassignolle, laboureur, 46 ans.

 

Louis Delacoste, laboureur, 46 ans

 

Angèle Desangles femme de Benoit Guyot, 38 ans (le mari absent pour 2 mois : sans doute un marchand ambulant)

 

Benoît Berthillot fils de Claude Berthillot, laboureur 25 ans