Sur une carte postale ancienne, on voit au sommet de la place, garée, une belle voiture décapotable. Difficile de la reconnaître. Quelqu’un  a suggéré qu’il pourrait s’agir d’un américaine, plus précisément une Studebaker 1930s. Pourquoi être aussi précis alors que rien ne permet de bien distinguer le modèle ?

En fait, en raison de souvenirs et en relation avec le lieu où elle est garée.

Elle se trouve devant un café dont la porte est ouverte, café connu pour être celui où Madeleine Prajoux travaillait à la fois comme serveuse et comme modiste. La propriétaire du véhicule serait-elle venue essayer un beau chapeau pour ne pas être trop décoiffée dans la Studebaker décapotable ?

Il y eut bien régulièrement une Studebaker au bourg d’Écoche à la fin de la guerre.

C’était celle d’une enfant du pays qui, belle jeune fille, s’était engagée comme religieuse enseignante au Maroc. C’est dans cette colonie qu’elle rencontra un beau capitaine pour qui elle quitta l’habit ; ils se marièrent et eurent de belles voitures. Elle revenait chaque année ou presque voir sa famille marquant par ses excentricités les villageois qui devaient la regarder avec un peu de malice et surnommaient la rutilante Studebaker, le baquet. On se souvient «  Elle arrivait en Studebaker (le baquet disaient les Écochois) qui grimpait difficilement le petit chemin d'accès à la maison de son  père  sous les bois du But. Une dame avec son fume cigarettes et ses breloques d'or tintinnabulantes. Certains en étaient même gênés. »

Après avoir exploité quelques congénères en Algérie où il vivait dans un magnifique appartement sur les Arcades du port d’Alger, le capitaine mourut. Moins âgée, la belle et un peu scandaleuse Écochoise se retira en France et ne revint à Écoche que pour se faire enterrer dans le cimetière de son pays natal.

La voiture de la carte postale est-elle le « baquet » ? Sans doute pas, mais en tout cas elle peut évoquer cette élégante (sulfureuse?) qui frappait les imaginations locales.... Qui les frappait d'autant plus qu'à l'époque les mariages mixtes étaient rares en Métropole, inenvisageables à Écoche surtout quand la "mixité" allait jusqu'à l'union d'une religieuse et d'un "musulman" (comme on désignait alors la population indigène dans les colonies). Pour certains n'était-ce pas le diable? Si aujourd'hui il s'habille en Prada, il faut croire qu'alors il roulait en Studebaker!


Ci-contre gros plan de la voiture sur la Carte Postale.

Ci-dessus une voiture de collection en vente sur le site https://classicscars.com  

Il s'agit du modèle

1930 Studebaker President Rumbleseat Roadster.

S'il y a parenté, on voit que le moteur de l'Écochoise paraît plus modeste et le capot davantage incliné



Autres grilles de lecture:

-C'était une femme audacieuse, émancipée mais restée fidèle à ses lieux originels

-Aucun caillassage de la Studebaker? Mais alors les Écochois étaient-ils tolérants? Ils n'étaient pas ces sauvages que certains imaginaient? Voir le petit paragraphe : incultes ?


Le modèle 1958 serait plutôt celui qui sillonnait les chemins écochois