Jules Aubonnet 

maire d'Écoche de 1892 à 1908.

Aubergiste et boulanger, c’est un républicain. Ayant pris fait et cause pour les ouvriers du textile, notamment à l’occasion d’une grève, il passait pour un rouge. Le poète conservateur Louis Mercier l’a mis en scène en le ridiculisant un peu dans un de ses contes « l’Ane du Popon » En effet son sobriquet était à Écoche «notre popay» mot que l’on peut rapprocher de père-patron. Il résidait à Lachal.

Il devait mourir, moins de quatre ans seulement après la fin de ses mandats. Un article du Journal de Roanne du 31 mars 1912 nous l’apprend sobrement.

 

Mort subite. Lundi, M. Aubonnet, ancien maire d’Écoche qui s’était rendu à Cours pour consulter un médecin est mort subitement dans cette ville. C’est au moment de s’en retourner que, pris d’un malaise, il s’arrêta à l’hôtel Giraud, où malgré les soins prodigués il expira. Il était âgé de 62 ans.

 

Entre 1870, dernier conseil du second empire et1900, dernier conseil du 19e siècle mais aussi 1er du 20e, tout le conseil a été renouvelé et est passé de "conservateur" à "républicain". Géographiquement, le bourg perd de son importance au profit principalement du sud-est du territoire de la commune et des hauteurs. Les changements sont aussi dans les métiers exercés, sans que cela soit toujours très net en raison de la double activité cultivateur/tisseur très répandue.



Le "moment Aubonnet" a été porté par un syndicat de tisseurs qui regroupait des tisseurs à bras. On le voit dans ses revendications qui portent sur le "tarif" et sur la protection aux frontières.

Il y avait eu une ébauche de mouvement de type luddiste en 1848. Des fileurs de coton du Haut-Beaujolais se sont regroupés en vue de détruire la filature de Cadolon (alors sans doute la plus importante de toute la région). Un peloton de gendarmes à cheval a alors été cantonné dans le château qui était en construction, en provenance de Charolles.

Le "moment Aubonnet" est aussi à Écoche une période de relatif anticléricalisme qui se traduit principalement autour de l'école. La municipalité refuse d'aider l'école des soeurs.

Aux yeux des milieux conservateurs du Roannais et notamment à travers le Journal de Roanne, Écoche était alors considéré comme "socialiste". En fait c'est le refus d'aider l'école des soeurs* qui donne à cette municipalité son côté anticlérical. Mais il n' y eut rien de vraiment socialiste, le terme agissant un peu comme repoussoir surtout pour les milieux cléricaux. L'aventure de "gauche" (pour prendre un terme malgré tout réducteur) se termine brutalement aux élections de 1908. Pourquoi? Sans doute pour deux raisons qui se sont cumulées.

-tout d'abord Jules Aubonnet qui avait quelques ennuis de santé (il décède quatre ans plus tard seulement) s'est laissé emporter par quelques éléments plus radicaux et présente une liste -sans tête de liste véritable- nettement engagée puisqu'intitulée liste républicaine et démocratique, ce qui a détourné des électeurs plus modérés. Sans oublier le contexte national de la loi de Séparation de l'Eglise et de l'Etat...

-ensuite la société écochoise se modifiait par l'exode rural. La commune était passée en-dessous des 1500 habitants et l'on élisait donc 12 conseillers seulement contre 16 en 1900. Le nombre d'inscrits était passé de 483 à 458. Or presque tous les départs étaient des ouvriers tisseurs ; la base électorale de Jules Aubonnet avait fondu.

Ainsi en 1908, seuls quatre membres de la liste Rd furent élus -mais pas Jules Aubonnet. Les 8 autres élus étaient "divers", sans liste. Le conseil élit un nouveau maire : un agriculteur également négociant en charbon, Claudius Auvolat (11 voix sur 12) ; fait remarquable : en 1912 c'est lui, maire sortant qui recueillit le plus de suffrages, comme une sorte de plébiscite assez rare (on a toujours quelque chose à reprocher à un maire!) . Malheureusement  ce mandat de Claudius Auvolat fut écourté en raison de la guerre, il avait été mobilisé.

 

 *Et peut-être celle des frères Maristes. A une date indéterminée, le frère Avit note "Le maire est sous la main du sénateur Brossard. Le conseil municipal est assez bon mais comprend des membres peu éclairés, sans caractère et se disant républicains." Brossard, républicain modéré, n'ayant été sénateur que de 1885 à 1894, il pourrait s'agir de la municipalité Vacheron (1878-1887), remplacée entre 87 et 92 par la municipalité Morel conservatrice, cléricale et peut-être même royaliste, si l'on en croit la nécrologie de François Morel par l'Action Française en 1927.

 

Conseil de 1908-1912 :

Claudius Auvolat, maire, cultivateur, le Bourg

Jean Marie Poizat, adjoint, cultivateur, Juin

Eugène Grizard, cultivateur, la Quichère

Claude-Marie Butaud, cultivateur, Lardillat

Jean Tissier, épicier, le Bourg

Claudius Collonge, tisseur en soierie, La Forest

Philibert Berthillot, tisseur, Berthillot

Jean Thivend, tisseur, la Forest

Auguste Batailly, tisseur, Juin

Célestin Delorme, tisseur, Berthillot

Prosper Brossette cultivateur et tisseur, le Crot des Bois.

 

A noter : en rouge, ceux de la liste RD. Mais parmi les autres Conseillers, on retrouve 4 noms qui avaient siégé en 1900 et avaient élu Jules Aubonnet (Grizard, Butaud, Collonge, Brossette). Ces quatre s'étaient en quelque sorte désolidarisés de la "radicalisation". D'autre part le changement de profession de Claude-Marie Butaud est révélateur d'une évolution d'Écoche à ce moment : CMB était tisseur à bras en 1900 mais avait aussi une vache ou deux. En 1908 c'est sa petite ferme qui est son revenu principal, le métier à bras ayant cessé peut-être toute activité....

 

Conseil de 1912, prolongé jusqu'en 1919 en raison de la guerre.

409 inscrits, 346 votants (participation : 84.5%). Population totale : 1058.

 

Claudius Auvolat, cultivateur, le Bourg, 259 voix obtenues

Prosper Brossette, cultivateur, le Crot des Bois, 244 voix

Eugène Grizard, cultivateur, la Quichère, 240 voix

Jean-Marie Poizat, cultivateur, Juin, 235 voix

Claude-Marie Butaud, cultivateur, Lardillat, 229 voix

Cyrille Plasse, maçon, le Bourg, 219 voix

Claudius Collonge, tisseur en soierie, la Forest, adjoint, fera fonction de maire quand claudius auvolat sera empêché par sa mobilisation (1914-début 1919) puis élu maire fin 1919 dans une nouvelle municipalité, 213 voix obtenues

Jules Lebretton, tisseur en soierie, la Forest, 213 voix

Philibert Berthillot, tisseur, cultivateur, Berthillot, 196 voix

Célestin Delorme, tisseur, cultivateur, Berthillot, 180 voix

Claude Jolivet, tisseur en soierie, le Bourg, 177 voix

Auguste Batailly, tisseur, Juin. 177 voix

 

Où l'on voit une continuité forte : 9 conseillers sur 12 sont des réélus (en roux).