1813

 

Insoumis, déserteurs, réfractaires : le vocabulaire est divers pour désigner les jeunes hommes qui au moment des guerres napoléoniennes cherchent à échapper au service militaire. Dans son livre La Loire et l’Aigle, les foréziens face à l’état napoléonien, Pascal Chambon qualifie cette opposition de protéiforme (chapitre II). Et il montre que certaines régions de la Loire sont particulièrement représentées comme le canton de Belmont. A cela sans doute deux motivations principales : le refus de partir loin de chez soi pour une période indéterminée et pour les risques encourus, mais aussi la faible adhésion au régime de Napoléon, loin de la légende qui prévaudra ensuite et à la différence des mariniers de Roanne. Pourquoi cette opposition ?  Certains n’ont pas apprécié le concordat ; non loin d’Écoche s’est formée par exemple une petite église, les blancs, comme à Tancon. D’autres voient en Napoléon le continuateur de la Révolution souvent mal appréciée après les épisodes de la terreur de Lapalus. Certains par conviction monarchiste. Quoi qu’il en soit, on peut repérer ce refus du service militaire à Écoche. Pascal Chambon cite le cas du maire Buchet.

 

                 En 1811, c’est celui d’Écoche qui est d’abord suspendu par le préfet pour avoir fourni un passeport au nom de Bussy à un déserteur nommé Lardey, arrêté peu après par la gendarmerie en Saône et Loire. Ce dernier déclare alors avoir acheté ce passeport au maire au prix de 150 F. L’affaire semble bien se terminer pour ce magistrat qui obtient en mai suivant une mise en liberté provisoire.

 

Mais, ajoutons-le, il ne retrouvera jamais le fauteuil de maire.

 

Pascal Chambon repère aussi plus largement cette tentative d’échapper à l’armée par les mariages anticipés, principalement en 1813. Nous avons comparé le nombre de mariages célébrés à Écoche et dans les localités environnantes entre 1809 et 1816 et cela donne le tableau suivant où l’on voit bien que l’année 1813 se distingue, suivie par un faible nombre de mariages l’année suivante, 1814, ce qui suggère bien à une anticipation des unions.

 

 

1809

1810

1811

1812

1813

1814

1815

1816

Écoche

8

9

10

10

29

5

16

4

Arcinges

1

1

2

0

15

1

3

3

Sevelinges

9

4

5

4

14

5

10

9

Belmont

15

12

25

28

48

13

25

38

Belleroche

4

4

2

3

16

8

7

6

Cuinzier

7

7

4

4

8

0

7

10

St Germain

9

7

7

9

21

6

14

9

Mars

6

10

3

5

24

1

7

5

Coublanc

5

8

5

3

12

3

8

8

Saint Igny

1

3

3

7

12

3

3

6

Tancon

4

5

3

4

12

5

9

9

Cours

33

35

31

48

112

22

76

72

Thel

13

11

12

34

23

8

9

8

Ranchal

6

20

6

36

47

12

4

18

Maizilly

6

0

2

2

8

2

4

0

 

 

 

 

 

 

Enfin on peut noter les cas de quelques soldats morts dans les guerres napoléoniennes, davantage suite à leurs blessures que sur le champ de bataille, comme François Puillet mort le 18 août 1806 à l’hôpital de Colmar, Benoît Lafond mort le 30 août 1811 à l’Hôtel Dieu de Marseille,  Claude-Marie Magnin revenu mourir le 1er novembre 1811 à Fontimpe en sortant de l'hôpital Saint Louis de Besançon, Jean Bussy mort le 26 janvier 1814 à l’hôpital civil de Besançon ou encore Charles Belot décédé à l’hospice des malades de Chalon le 18 août 1814 à l’âge de 18 ans. Ce dernier cas correspond à l’invasion du territoire français par les coalisés et à la nécessité de recruter de jeunes soldats inexpérimentés, les fameux régiments des Marie Louise.

L'histoire de Vincent Lièvre est encore différente : il a été tiré au sort en 1812 et faisant partie de la classe 1813 est parti à la guerre. Né de père inconnu, orphelin de sa mère en 1804, à son retour de l'armée, il ne sait pas exactement quand il est né ; c'est pourquoi il demande en 1818 un acte de notoriété et grâce à des témoins on lui attribue une date de naissance : 28 décembre 1793. Mais beaucoup d'anciens grognards nés dans des villes plus importantes  par exemple auront beaucoup de mal à se réhabituer à la vie civile et certains embelliront leur passge sous les drapeaux contribuant à la légende napoléonienne. Bien des années plus tard un autr soldat de l'empire Claude Aucler survivant sera décoré après 1857 de la médaille de Sainte Hélène, créée par Napoléon III.