Un registre éclaire un petit pan de la culture religieuse des Écochois.e.s du XIXème siècle

On a pu avoir à disposition ( merci à ceux qui l'ont trouvé) un registre du XIXème siècle provenant de la paroisse. Ce gros registre de format 20cm/27cm, et de 3 cm d’épaisseur, à la couverture de carton fort (et abimée), est constitué de feuilles de papier dit « quart parchemin ».

 

Sur la 1ère page cinq paragraphes expliquent son contenu.

 

 

 

Le 1er paragraphe est ainsi rédigé : Registre pour la Confrérie du Sacré cœur de Jésus et du Saint Sacrement établie  dans l’église paroissiale d’Écoche le premier juillet 1808.

 

Le 2ème, à la suite sans alinea mais d’une écriture plus fine : Ladite confrérie a été établie à perpétuité par M. Courbon vicaire général du diocèse de Lyon le 23 novembre 1821 en vertu d’un bref qui lui a été adressé par Sa Sainteté Pie Sept le 7 avril 1820

 

Le 3ème, bien séparé, stipule Le trois septembre 1813 Mgr le cardinal Fesch archevêque de Lyon a donné la confirmation à St Germain la Montagne. Suivent les noms de ceux qui y ont été confirmés.

 

Le 4ème paragraphe précise La susdite confrérie du Sacré Cœur et du St Sacrement ont été établies à perpétuité par M. Courbon vicaire général  le 23 novembre 1821. Après le 10 juin 1822 on n’appelera que ceux qui suivront les mots à perpétuité qui sera à la tête de chaque lettre alphabétique.

 

 

 

Après une grande séparation (trois traits et un espace), le cinquième paragraphe revient sur une période antérieure au registre et précise : L’an 1743 le 26 mars, Mr Boisseaud curé d’Écoches, les fabriciens et les habitants réunis ensemble adressèrent une requête à Mgr l’évêque de Mâcon où ils lui exposaient que depuis longtemps ils avaient le dessein de faire ériger une confrérie en l’honneur du Sacré cœur de Jésus et Marie pour augmenter leur dévotion envers le Seigneur et sa très Ste. Or cette confrérie fut approuvée érigée dans l’église paroissiale d’Ecoches. Et en 1745 26 janvier le souverain pontif Benedictus XIV confirma et approuva cette confrérie pour la plus grande de Dieu et l’honneur des Sacrés de Jésus et de Marie. Il y aurait 131 que les habitants de paroisse se seraient consacrés aux Saints Cœurs de Jésus et de Marie.

 

 

 

Au verso de cette 1ère page il est juste écrit Jean Chemin prêtre.

 

 

 

Puis dans les pages suivantes suivent des listes de noms.

 

 

 

Ainsi la première page nous apprend que ce registre a été commencé en 1808 par Jean Chemin qui est devenu curé d’Écoche en 1805. Jean Chemin sera aussi à l’origine de la construction d’une nouvelle église dont les travaux démarrent en 1840. Ce prêtre concordataire paraît donc ambitieux pour sa paroisse. Et, semble-t-il, il envisage cette ambition dans la continuité de l’Ancien Régime (restauration) puisqu’il relate la création trois quarts de siècle plus tôt d’une confrérie semblable par le curé Boisseaud. Le lien est difficile puisqu’entre temps il y a eu la révolution et le passage d’Écoche du diocèse de Mâcon à celui de Lyon, sans omettre que les paroissiens de 1745 sont vraisemblablement tous disparus.

 

Il est significatif de noter que les paragraphes ont été écrits à des dates différentes (cf la qualité de l’écriture et de l’encre). Le 1er en 1808, sous l’empire triomphant. Les 3 suivants entre novembre 1821 et juin 1822, période de la restauration.

 

Quant au dernier il est difficile de le dater mais sans doute aussi sous la Restauration. Bien qu’écrit avec soin, il est peu aisé de saisir le sens de la dernière phrase. Peut-être que le nombre des membres de l’ancienne confrérie s’élevait à 131 (mais quand ?).

Autre hypothèse : ce paragraphe aurait été écrit bien plus tard 131 ans après 1743 soit en 1874. Et aurait été écrit par Mathieu Puillet, curé à cette date.

 

 

 

Dans les pages suivantes, contrairement à ce qui est annoncé dans  le 3ème paragraphe on ne trouve pas le nom des confirmés de 1813 quand l’Archevêque s’est déplacé à Saint Germain la Montagne.

 

 

 

Suivent des listes :

 

Première liste : celle des hommes de la confrérie classés par ordre alphabétique de leurs prénoms ; tout d’abord les inscrits de 1808 à 1821 puis ensuite les inscrits « à perpétuité » à partir de 1821. a chaque lettre, plusieurs pages prévues pour de nouveaux inscrits qui restent donc blanches. Il semble qu’après 1827 on n’ait plus inscrit beaucoup de nouveaux noms, et certainement pas après 1844

 

Deuxième liste : celle de femmes de la confrérie classées de manière identique.

 

 

 

Aux deux tiers du volume commence une troisième liste intitulée Registre de la Confrairie (sic) du St Rosaire établie à perpétuité. Suivent 10 pages de nom (sur deux colonnes) sans ordre alphabétique ni séparation de genre. Dans cette liste il est vrai les femmes sont dominantes. Le classement est annuel ; la première année est celle de 1822 et le 1er inscrit Jean Chemin, curé. A partir de 1849 les mises à jour correspondent à la fête du St Rosaire ( 6  ou 7 octobre) et parfois au 15 août. A partir de 1856 le nom est suivi d’un nombre correspondant semble-t-il à un droit d’inscription ; les sommes recueillies sont  déposées dans la « caisse des défunts » à la sacristie. Les sommes sont minimes.

 

Cette liste s’arrête en octobre 1881.

 

 

 

Puis une nouvelle liste commence intitulée Confrérie du Rosaire érigée canoniquement le 1er juin 1881.

 

Écrite au départ à l’encre violette, d’une écriture soignée (pleins et déliés), du moins sur les premières années.

 

En tête le nom d’Étienne Seytre le curé et de son vicaire François Blettery (celui-ci est rayé lorsqu’il est remplacé par Pierre Richard.)

 

Cette liste court de 1881 à 1899 avec de moins en moins de noms et ce sont à plus de 80% des noms de jeunes filles. Les 7 derniers noms inscrits en 1899 sont ceux de Françoise Crétin, Marie Déclas, Louis Muguet, Thérèse Gelin, Joséphine Corneloup, Marie Gougeat et Françoise Troncy.

 

Cette dernière liste ne contient aucune précision sur les personnes ou sur les versements. Simplement quelques noms sont rayés, sans doute au moment de leur décès. Il semblerait que l’on inscrivait les filles vers 10-11 ans peut-être au moment de leur confirmation ?

 

 

 

Beaucoup plus loin dans le registre  on trouve au haut d’une page les « dépenses de la confrérie » (la plus ancienne)

 

Pour le registre 3 francs ; pour les bans des adorateurs 13 francs ; pour deux livres de cierges 2 francs 16 sous ; pour deux petits livres d’adorateur 10 sous ; pour deux verres de lampes 2 francs ; à Louis Danière pour huile 3 francs 2 sous ; à Benoît Marie Brossette pour un sablier 1 franc 10 sous ; plus deux livres d’adorateurs 12 sous ; plus pour l’ostensoir 252 francs 5 sous ; plus pour une nappe du grand autel 15 francs..

 

 

 

Recettes (page suivante) : ouverture faite des deux petits trous d’adorateur nous y avons trouvé sept livres le 25 décembre 1808. En principe  le franc est la monnaie officielle !

 

 

 

Revenons aux premières listes.

 

Avant 1821 les noms, très nombreux, font apparaître  le prénom et le nom précédés soit d’une petite croix soit d’une somme (10 sous). A la suite de chaque nom souvent rien mais parfois pour distinguer deux individus on indique une caractéristique : l’aîné, le cadet, le jeune ou le village. Pour certains après coup a pu être rajoutée la date de la mort

 

Après 1821 c’est presque identique sauf qu’il n’y a aucune somme !

 

 

 

Exemples de la lettre A hommes : Antoine Danière village Fillon et Antoine Danière du Creux Loup ;  Antoine Poulette l’aîné et Antoine Poulette le cadet. Quelques personnes inscrites n’habitent pas Écoche, dans ce cas on précise soit hors paroisse, soit le nom de la paroisse ; ces cas sont plus fréquents pour les femmes et beaucoup  moins nombreux après 1821.

 

Beaucoup de membres avant 1821 sont réinscrits après 1821, sauf ceux qui sont déjà disparus ou quelques-uns venant d’une autre paroisse.

 

Vu l’étendue de cette première confrérie (si l’on ne prend pas en compte celle de 1745) on voit que beaucoup d’Écochois en font partie. Il est bien sûr très difficile de voir si elle correspond à une grande piété ; de toute façon elle doit certainement beaucoup à l’action (au charisme ?) de Jean Chemin. On y trouve les maires Jean Morel, Benoit Marie Brossette, Laurent Glatard, Benoit Buchet, Pierre Marie Glatard. A Écoche la Restauration restaure aussi l’alliance du trône et de l’autel (les maires ne sont alors pas élus)

 

Les paroisses qui fournissent quelques membres ne sont pas très éloignées , quoique parfois : Belmont, 36 inscrit(e)s, St Igny de Roche 15 inscrit(e)s, Chauffailles 11, Arcinges 7,  Mars 5, Mardore 4, Cours 4, Coublanc 3, Belleroche 3, Cuinzier 2 (dont le curé Moulin),Cadolon, Saint Racho, Thizy, Mussy sous Dun, Sevelinges, Maizilly, Chandon, chacune 1 ; quatre sont dits Hors paroisse.

 



Entre 1808 et 1821 soit pendant 12 ans se sont inscrits dans la confrérie du Sacré cœur et du Saint Sacrement 484 hommes et 679 femmes, soit 1163 personnes ; même s’il y a quelques personnes venant de paroisses voisines et même s’il y a renouvellement partiel, ce chiffre paraît énorme puisque la totalité des habitants en 1821 était de 1335.

 

On peut y voir, outre la personnalité charismatique du curé Chemin, un contrecoup de la période révolutionnaire avec une reprise en main cléricale mais en même temps cela montre que la religion catholique avait, dans cette région, à cette époque, un poids social. A la fin du XIXème, ce n’est déjà plus la même chose, puisque dans la confrérie du Rosaire, entre 1881 et 1899, soit sur une quinzaine d’années, on ne trouve plus que 245 inscrits et à plus de 80 % des femmes : seules, semble-t-il, les dévôtes  -ou destinées à le devenir puisque ces femmes sont encore des enfants- sont concernées.

 

 

 

On s’est amusé à relever les prénoms de la période 1808-1821 qui constitue un bon échantillon pour connaître l’usage. Ce n’est pas une surprise de constater que tous ces prénoms appartiennent au calendrier catholique ; par contre la variété en est faible.

 

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Occurrences des prénoms à Écoche au début du XIXème siècle
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