On a trouvé dans les papiers Vichy (314.01) un ensemble de feuillets datant de 1725 et intitulé Dénombrement des fonds dépendant du canton d’Escoches, c’est-à-dire le territoire de la paroisse. Feuillets faisant partie d’un dénombrement englobant Arcinges et Écoche, demandé par l’élection de Villefranche. Les feuillets d’Arcinges ont disparu comme peut-être quelques lignes pour Écoche. Mais il y a là l’essentiel : 63 noms soit 63 feux, en fait 62 puisque Deschezeaux habite désormais à Saint Maurice mais reste le plus gros propriétaire d’Écoche. 62 feux cela fait en gros 300 habitants. Il manque les fermiers des domaines du seigneur, le curé aussi qui a quelques biens.

A la fin, les consuls écrivent : « Les déclarations ci-dessus des biens de tous les habitants des cantons d’Arcinges et d’Escoches qui sont situés en montagne pour seignes et infertiles le plus juste qu’il nous a été possible de savoir, tant par lesdits habitants desdits cantons que par nous Anthoine Vadon et Claude Poncet, consuls déclarant que la mesure ou bichet dont est parlé ci-devant est de deux mesures la me ??  (bicherée ?) et de quatre coupes à la mesure de Charlieu dont les usages dans nosdits cantons bleds bichets p... environ 50 livres et se vend année commune ledit bichet 45 sols et les menus grains 25 sols le bichet déclarant nous dits consuls que tous les grains que l’on cueille tous les ans il n’y a que pour nourrir 6 mois de l’année lesdits habitants et que les foins qui se recueillent aussi il ne se vend pas un quintal et qu’il est employé pour la nourriture des bestiaux que chacun tient en leur maison. Et a signé ledit Anthoine Vadon et non ledit Poncet pour ne savoir écrire. »

Cela nous laisse comprendre comment sont réalisées ces enquêtes : par les consuls qui passent interroger les gens. Vu la destination (payer la taille) il est évident que les valeurs sont tirées par le bas et parfois de façon inégalitaire : les plus importants des propriétaires sont davantage minorés que les autres. Ce fut longtemps le cas, y compris au 20e siècle, lorsque les commissions révisaient la valeur des biens cadastraux, les commissaires paritaires étant issus des agriculteurs plus aisés. Si les chiffres donnés ne sont pas à prendre de manière absolue, l’ensemble permet toutefois de se faire une petite idée des ressources du premier quart du 18e siècle.

Dans le tableau suivant, voici ce  que représentent les données de chaque colonne

1 : La condition. L= laboureur. M= Maréchal. J= Journalier. W= mendiant. C = Chirurgien. Mç = Maçon. U = consul

2 : Tènement d’habitation. a= Maison avec Jardin / b= a+ Chenevière  / c= a+ Verchère / d = b + grange étable ou écurie

3 :  Superficie du tènement. Bic = bicherée / Co = Coupe / m=mesure

4 : Valeur locative du tènement £ = Livres ; S = sol (1livre vaut 20 sols) (par an)

5 : Superficie des terres labourables exprimée en bicherées

6 : Rendement des terres labourables exprimé en  bichets de seigle (Sg) ou en menus grains (Mg). Seigle si non précisé

7 : Prés, superficie en bicherées

8 :Prés , quantité de foin récoltée en quintal de l’époque

9 : Broussailles, terres incultes, vassibles, brindes, dites sans revenus sauf à faire paître les animaux. Superficie en bicherées

10 : autres biens, V= vigne pour mauvais vin en bicherée. V, 1 veut dire vigne d’une bicherée ;  T : bois taillis pour bois de chauffage en bicherée : T,1 veut dire Taillis d’une bicherée. SC = moulin à scier le bois.

 

Patronyme

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

Sr Pierre Deschezeaux

 

 

 

 

25

70 Sg

15 Mg

14

55

15

V1

T15

Claude Laras

L

d

½ Bic

 

6

18 Sg

3 Mg

3.5

2

5

 

Benoit Fonteret

 

a

1 Co

 

1

2

1

4

 

 

Jean Guiot

M

a

1 Co

 

1

2

2

2

 

 

Antoine Boisson

J

a

 

40 S

0.5

1.5

0.5

3

 

 

Étienne Lafond

J

a

¼ Bic

 

 

 

 

 

 

 

Sr Jean Lebreton

C

d

2 Bic

 

11

15 Sg

13 Mg

5

20

7

V1

T

Jean Debiesse

L

b

½ Bic

4 £

3.5

4.5

1

6

2

 

Estienne Silvestre

L

a

½ Bic

 

5

15 Sg

2 Mg

2.5

10

1

 

Philippe Jacquet

J

a

¼ Bic

 

 

 

 

 

 

 

Clément Fillion

J

a

¼ Bic

 

 

 

 

 

 

 

Claude Fonteret

L

b

½ Bic

 

5.5

10 Sg

2Mg

2.5

2

3

 

Marc Buchet

J

b

¼ Bic

4 £

0.5

1.5

0.5

3

 

 

Henri Jonard

J

b

¼ Bic

5 £

0.5

1.5

1/8

2

 

 

Jean Perricaud

b

2/3 Bic

8 £

2

4

0.5

5

 

 

Pierre Dinet

J

b

½ Bic

4 £ 10 S

1

2.5

¼

 

 

 

Sieur Jean Destre

 

b

1 Bic

8 à 10 £

10

27 Sg

3 Mg

4

35

5

T 7

Sc

Jean Larue

J

b

½ Bic

7 £ 15 S

1

4

0.5

5

 

 

Jean Seguret

L

a

3/16 Bic

 

3.5

9

2

8

2

 

Estienne Aucler

J

a

3/16 Bic

 

0.25

1

 

 

 

 

Pierre Fontenille

 

a

1/8 Bic

 

 

 

 

 

 

 

Claude Place

L

a

¼   Bic

 

4

10

1.5

6

1

T

Benoit Aucler

J

a

¼  Bic

 

2.5

7.5

1

6

1

 

Claude Lafond

J

a

1/8 Bic

 

0.5

2

2

2

2

T

Estienne Crestin

L

a

1/8 Bic

 

1

3

1

4

1

 

Jean Aucler

J

a

1/8 Bic

 

0.5

2

0.5

2

1

 

Claude Lafond le jeune

 

a

3/8 Bic

 

0.5

2

0.5

1.5

 

 

Anthoine Place

J

a

1/4 Bic

 

 

 

 

 

 

 

Claude Marchand

L

a

1/3 Bic

 

3.5

4

1

4

1

 

Claude Poncet

L + U

b

¼  Bic

7 £

3

8 Sg

1 Mg

1

2.5

 

 

Estienne Laroche

L

b

 

6 £

2

4.5

1

2.5

 

 

Nicollas Sapally

J

b

 

3 £

 

 

 

 

 

 

Benoist Quartelier

J

a

 

 

1

3

0.5

3

 

 

Anthoine Déal

L

b

½  Bic

5 £

2

6

1

5

 

 

Vve Philibert Laplace

 

b

½  Bic

3 £ 10 S

 

 

 

 

 

 

Benoist Chavanon

J

c

 

3 £

 

 

 

 

 

 

Vve Debiesse

 

b

½  Bic

3 L 10 S

 

 

 

 

 

 

Vve Aucler

 

c

3/16 Bic

50 S

 

 

 

 

 

 

Louis Fagot

J

b

1/8 Bic

20 £

 

 

 

 

 

 

Claude Montadre

J

c

¾ Bic

3 £

 

 

 

 

 

 

Claude Bussi

L

a

 

 

2.5

6 Sg

1 Mg

1

7

 

 

Claude Letraive

J

a

 

 

1.5

2.5

0.5

3

 

 

Blaize Bussy

J

a

1 Co

 

2

3.5

2

8

 

 

Grégoire Brossette

J

a

 

 

0.5

2

0.25

2

 

 

Jean Brossette

J

a

1Co

 

2

4

1

3

 

 

Jean Dumont

J

a

1 co

 

0.5

2

 

 

 

 

Grégoire Brossette

W

a

 

 

 

 

 

 

 

 

Barthélemy Desnoyers

 

a

1 Co

 

 

 

 

 

 

 

?

 

 

 

5 £

1

2

0.75

3

 

 

Locataire de Claude Besson

 

a

1 Co

3 £

 

 

 

 

 

 

Claude Morel

L

d

1 Bic

8 £

5

10

2.5

10

3

T1

Jean Besacier

L

b

2 Bic

6 £

3.5

9

2.5

10

1.5

T1

Claude Cuisinier

J

b

¼ Bic

3 £

1

3

1.5

4

1

 

Claude Laval

J

b

2 Co

3 £

1

3

2

4

 

 

Benoist Delaval

J

b

1 Co

3 £

0.5

2

0.25

3.5

 

 

Anthoine Boland

J

b

 

3 £

2

3

0.25

2

 

 

Jean Fonteret

 

b

2 Co

5 £

1.5

4

2

15

1.5

 

Pierre Buchet

 

b

½  Bic

4 £

2

8

1

10

1

 

Claude Bertilliot

 

b

½ Bic

4 à 5 £

3

10

1

4

1

 

Jean Bertilliot

L

b

½ Bic

6 £

3

10

1

4

0.5

 

François Bertilliot

L

b

1 m

3

5

1

4

1+2

 

Jean Fillion

W

a

1 Co

 

 

 

 

 

 

 

Claude Debiesse dit Galichon

L

b

1 Bic

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lecture, explications

-Les feuillets ne donnent pas le village de chaque feu, néanmoins on comprend que chaque feu est proche dans la liste d’un feu voisin (parcours du consul). Comme, en revanche, dans d’autres documents on connaît le village de quelques-uns, on a utilisé des couleurs pour rendre compte de la situation possible de chaque feu sur le territoire.

 

Le bourg, la Baize,, Bernay, les Seignes

 

L’Ardillat, Fonteret, Goutte michel, Fillon

 

La Quichère, Chez Forest

 

Fontimpe

 

Laval

 

Bertillot

 

-Les mesures de Charlieu ont une équivalence approximative :

En superficie : Une bicherée =±  22 ares  / Une mesure =± 11 ares /  Une coupe =± 3 ares.

Une bicherée, ou bichetée ou, ici, bichonnée est théoriquement la surface qu’un paysan peut ensemencer avec un bichet de grain

En capacité de grains, le bichet vaut à peu près  55 litres

En poids de foin ; Un quintal = ± cinquante livres, la livre de Charlieu valant un peu moins de 500 g. donc un quintal équivaudrait à environ 25 kg. Pour donner un ordre de grandeur une botte de foin d’autrefois (petites rectangulaires) pesait autour de 10 à 15 kg. Une botte de moyenne densité autour de 20 à 30 kg. Une balle ronde entre 250 et 450 kg. Cela veut dire que quand on trouve 3 quintaux de foin, cela représente 75 kg environ, soit 7 bottes de jadis soit un petit chargement sur char à 2 roues. On voit par là la faiblesse de l’élevage. Quand on parle des bestiaux, la plupart du temps il s’agit de moutons ou de chèvres en très petit nombre. Mais, répétons-le, les chiffres sont minorés. Malgré tout ils montrent de faibles rendements ; et variables selon le sol : ainsi une bicherée de pré peut fournir 3 quintaux seulement, une autre 6 quintaux, du simple au double. Pour les grains le rapport entre ce que l’on sème et ce que l’on récolte est aux alentours de 1 à 3. Cela veut dire que l’on ne peut consommer que les 2/3 de la récolte, le reste sert comme semence.

-Peu d’élevage donc, très peu de vigne (on précise du mauvais vin), peu de bois, toujours pour bois de chauffage, seuls les bois du seigneur et de bourgeois extérieurs sont de la futaie ; ce qui est exagéré puisqu’on trouve un moulin à scier du bois !

-Beaucoup de chenevières (petites et dites ici cheveniers ). Le chanvre semble donc une ressource complémentaire. Et tous ont un jardin.

-Les métiers sont pensés par rapport au travail de la terre ici. Mais à la même époque dans d’autres documents on trouve aussi des marchands et des tixiers. Une forme donc de double activité.

- Les patronymes sont orthographiés de façon incertaine. Laras, plus tard Larrat ; Guiot, Guyot ; Aucler devient Auclerc ou Auclair ; Quartelier, Cartelier, etc.

-Rappel : la monnaie est la Livre tournois qui vaut 20 sols (ou sous) chaque sou égale 12 deniers. Certains estiment que la livre de 1725 équivaut à peu près à 16 euros d’aujourd’hui.

 

 

En résumé, ce dénombrement donne une vision misérabiliste de la situation économique d’Écoche. En raison de son but, le paiement de la taille, ce côté misérabiliste est sans doute fortement exagéré. Il n’empêche.


Le cas du sieur Pierre Deschezeaux est un peu particulier :

Premièrement sieur Pierre Deschezeaux bourgeois demeurant en la paroisse de Saint Maurice province du Mâconnais possède audit Escoches trois petits domaines, vingt-cinq bicherees de terres labourables, les trois annuellement soixante et dix bichets seigle, quinze bichets menus grains, une vigne de la contenue d’une bicherée qui peut produire annuellement cinq à six ...méchant vin. En pré la contenue de quatorze bicherees qui peuvent produire années communes cinquante cinq quintaux de foins. quinze bicherets de bois taillis et broussailles qui ne produit que du bois à brûler. En terres, brindes et paquerages de nul rapport quinze bicherets.


Ce dénombrement est-il complet ou partiel?

Si comme le font les historiens habituellement, on peut compter 4.5 à 5 personnes dans chaque feu, on aurait donc ici entre 280 et 310 habitants sur le territoire. Cela paraît n'être qu'une partie de la population. Quels sont les habitants non recensés ici? Le curé et peut-être sa domestique ; les fermiers des domaines du seigneur ; le granger du But. Et puis comme dit plus haut quelques noms présents sur d'autres feuillets disparus. En effet lorsqu'on parcourt les registres paroissiaux on trouve d'autres personnes. Par exemple en janvier 1726 est baptisée la fille de Catherin Auclerc et Jeanne Chappon. Mais en fin de compte on en trouve assez peu. Conclusion : si l'on comptabilisait les rares oublis, les fermiers, les grangers voire quelques "domestiques", on pourrait raisonnablement penser à une population voisine des 400 habitants en 1725.