Héritages : traces du passé.


Réflexions d'un archéologue/historien.

Dans l'introduction, certes un peu déconcertante, à son livre paru en février 2018 (Le pays des Celtes, le Seuil Paris, coll l'Univers Historique) Laurent Olivier fait part de sa réflexion sur les raisons de s'intéresser au passé. En voici ci-dessous quelques extraits.

« Le passé lointain se tient là, devant nous, mais ce n’est pas ce à quoi on s’attendait. C’est une confluence, dans laquelle se déversent tous les temps, tous ensemble au présent, simultanément. Le passé que l’on voit -puisqu’on y est- est d’abord fait de la masse de ce qui demeure, de ce qui est toujours là. Il est fait de cette présence inépuisable, infinie, de ce qui a été et continue à durer : la roche, les pierres, la terre sur laquelle on marche. Elles sont la peau et l’épiderme du monde. Et puis il y a ce qui vit : ce qui revient à chaque fois, tel qu’en lui-même, pareil et différent. Ce sont les bois et les champs, mais aussi les animaux et les gens qui habitent dedans et autour. Tout ce qui vit, toutes les choses vivantes qui peuplent le monde en ce moment, à la fois passé et présent....

 

....Le passé est vivant : mais de quoi ? Il est fait des êtres vivants, certes –les humains, les animaux, les végétaux- mais pas seulement. Peut-être faut-il poser la question autrement d’ailleurs : que voit-on ici qui apparaît, existe puis finalement disparaît ? Ce ne sont pas seulement les êtres vivants, ce sont aussi les choses que fabriquent les hommes –leurs maisons leurs objets- et puis celles avec lesquelles ils transforment les lieux qu’ils habitent : leurs chemins, les délimitations qu’ils tracent pour leurs champs et leurs places. Bien sûr ces choses ne sont pas vivantes ; pourtant elles aussi ont leur vie, au bout de laquelle elles s’éteignent comme individus. Les maisons finissent par s’écrouler par terre et les fossés par se boucher ; les pots à la fin se cassent. Alors on les répare ; et si ce n’est pas possible, on en fait d’autres, qui prennent leur suite. C’est ainsi que les choses continuent à vivre, en se reproduisant. C’est pourquoi les choses sont intriquées avec les hommes ; elles en sont inséparables. Depuis toujours, le métier d’homme a été de s’occuper des choses...

 

...Tout ce qui a vécu laisse une trace : ce sont des débris, des vestiges, des déchets en vérité. Car ce qui meurt cesse de vivre, non d’exister. Il en reste quelque chose qui demeure, comme chose. Ce sont des rebuts, des loques. Des épaves survivantes du passé. C’est le matériau même de l’histoire des hommes. On aurait tort de le mépriser...

 

...Le passé habite le présent ; il ne cesse de nous envoyer ces signes que, pour la plupart, nous ne savons pas reconnaître, car ils ont toujours été là...

 

...Alètheia* est une prairie, un paysage ourlé d’oubli... »

 

 

 

* Alètheia ou la Vérité est, en grèce archaïque, ce qui permet de repousser Léthé, ou l’oubli, enfant de la Nuit

 

 

 

in Laurent Olivier Le pays des Celtes, Paris 2018

 

Le paysage ci-dessous n'est déjà plus du présent (photographie datant d'août 2015) mais en passant sur le chemin du But, on peut repenser au texte de Laurent Olivier et s'arrêter quelques instants pour méditer sur ce "paysage ourlé d'oubli"

 

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A méditer devant l'écran??
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